L'usine européenne Mactac
/ groupe Bemis a été implantée à Soignies
(Belgique) en 1967. Durant plusieurs décennies, Le nombre du
personnel oscille entre 300 et 700 personnes. Durant les années
1990/2000, on compte quelques dizaines de licenciements. Néanmoins,
les ouvriers & les militants syndicaux engagent quelques
batailles afin d'obtenir de nouveaux droits et quelques conquêtes
intéressantes.
• 2014,
Bemis revend à Platinum Equity, un fonds d'investissement
privé basé en Californie, l'usine sonégienne
Mactac. Le montant s'élève à 170 millions
de dollars.
• Avril 2015, Platinium
Equity annonce un plan de licenciements. 175 emplois sont perdus.
fermeture complète de la filiale de Genk.
• 2016, Avery Dennison
(30.000 salarié(e)s dans plus de 50 pays) annonce un
accord définitif visant à acquérir les activités
européennes de Mactac auprès de Platinum Equity pour un
prix d'achat de 200 millions d'euros , en ce compris les dettes
opérationnelles et sociales.
• 2018, gros coup de promo
dans la presse, On parle même de renaissance, de miracle!
Le site de Soignies devient en termes d'emplois la plus grosse
unité européenne du groupe américain Avery
Dennison, avec à la clé, la « création »
de quelque 250 emplois....
Une armée de CDD font
leur entrée. Pression, stress, chantage à l'emploi sont
leur quotidien. Les accidents de travail montent en flèche...
Dans le même temps, on
engage à Soignies et on délocalise en Allemagne !
En fait c'est un transfert de production : Avery
Dennison va fermer son usine située à Schwelmer dans
laquelle travaillent 400 personnes. Dehors ! Circulez, y a rien
à voir !
• 2019, Rodange
au Luxembourg, le 2 octobre, Avery Dennison inaugure
l'extension de son site de production clôturant ainsi un projet
de 65 millions de dollars visant à renforcer son
implantation industrielle en Europe. Cet investissement est l'une des
plus importantes initiatives opérationnelles d'Avery Dennison
de ces dernières années...
Comme une impression..
• Juin 2020, la direction
annonce la réduction de capacité à
Soignies, environ 220 emplois seraient affectés dont
approximativement 135 contrats à durée déterminée...
Pourtant les sommes avancées
dans les communications de la multinationale filent le vertige :
- résultat du premier
trimestre 2020: les ventes nettes sont de 1, 72 milliard de
dollars
- le chiffre d'affaires était
de 7, 1 milliards de dollars pour l'année 2019
En mars, dans les usines, les
grandes surfaces ou les hôpitaux, nous étions des
héroïnes et héros. On bossait pendant la crise
Covid19. Avec courage, nous faisions tourner la société
ou nous nous occupions des autres. En juin, juste des
travailleurs kleenex, dommages collatéraux insignifiants de la
gestion libérale, des délocalisations et de la guerre
entre monopoles capitalistes.
Ces consortiums et cartels sont
des ententes ou groupements de capitalistes qui se constituent à
partir d'un niveau élevé de concentration de la
production et du capital. Sur le plan économique, la
domination des monopoles se traduit par l'obtention de superprofits.
L'activité des monopoles,
des multinationales, entraîne l'aggravation de toutes les
contradictions du capitalisme, notamment entre le caractère
social de la production et la forme capitaliste privée de
l'appropriation des richesses et des résultats du travail.
Ça va souvent à
l'encontre des intérêts des pays où ils opèrent
et a pour conséquence une intensification de l'exploitation
des travailleuses et travailleurs. Non ?
Samedi 20 juin est une nouvelle
journée de mobilisation en solidarité avec les
réfugié.e.s.*
Des
rassemblements, des manifestations auront lieu en soutien et pour
exiger la fin de la haine contre les réfugié.e.s.
Le
Haut-Commissariat aux Réfugié.e.s de l'ONU (HCR) nous
rappelle que 79,5 millions de personnes sont déplacées
de force dans le monde. Ce chiffre, nous le savons, est minoré
car des pays ne donnent pas le nombre de déraciné.e.s
en leur sein, comme la Chine par exemple.
Plus
des deux tiers des réfugié.e.s sont originaires de
Syrie, du Venezuela, d'Afghanistan, du Soudan du Sud et du Myanmar.
Des pays rongés par la misère, la guerre, la haine. Des
pays souvent théâtres des guerres déportées
entre grandes puissances (USA, Europe, Russie, Chine).
Le
changement climatique, qui n'existe toujours pas pour certains et
certaines, amène au déplacement contraint de
populations. Rien que cette année, c’est plusieurs
millions de personnes qui ont été directement impactées
par la sécheresse, la montée des eaux ou les pluies
diluviennes.
Face
à cela, nous avons des pays qui se recroquevillent sur
eux-mêmes, qui ferment leurs frontières, qui excluent
les réfugié.e.s, les chassent, les enferment, les
emprisonnent, les criminalisent, les laissent se noyer dans la mer,
le tout avec la collaboration des forces répressives, flics,
garde-côtes et militaires. C’est le cas de l’Europe
et de la France en particulier.
Certains
pays négocient même le fait de faire enfermer des
réfugié.e.s dans des camps au sein d'un pays
limitrophe, à coup de milliards « d’aide »
versés. C’est le choix de l’UE avec la Turquie.
D'autres les « parquent » sur des îles (Grèce,
Australie…). Les gouvernants débordent d'imagination
lorsqu'il s'agit d'exclure et d’humilier !
Nous
savons aussi que des êtres humains, sans attendre les ordre
d'États, savent humilier, exploiter. Nous avons vu des
réfugié.e.s vendu.e.s sur des marchés en Libye
comme esclaves, encore récemment.
Nous
affirmons haut et fort que nous luttons pour la destructions des CRA
(Centre de Rétention Administrative) et toutes les structures
d'enfermement, de contrôle.
Nous
luttons pour l'accès à la santé et à
l'éducation gratuites pour toutes et tous.
Nous
ferons tout pour arrêter les expulsions des squats et autre
lieu de vie et nous luttons pour un logement décent pour
toutes et tous.
Pour
la régularisation (faute de mieux) de toutes et tous, ici,
là-bas, ailleurs dès maintenant. Nulle n’est
étranger nulle part.
Pour
la liberté de circulation.
Si
nous luttons pour le droit de vivre librement pour toutes et tous sur
le globe, il nous paraît évident que nous devrons aller
encore plus loin, aux racines, pour stopper ces déplacements
forcés. Les guerres, le capitalisme, les nationalismes, les
haines, les pouvoirs, les frontières et donc les nations sont
autant de choses qui doivent disparaître pour qu'un jour les
humains et humaines soient libres de vivre, où ils et elles
veulent, comme ils et elles le souhaitent.
Nous
appelons à participer massivement aux rassemblements du 20
juin partout en France et au-delà, à être en
lutte avec celles et ceux qui ne demandent que le droit de vivre.
Notre
patrie c'est le monde, notre loi la liberté. Vive l'anarchie !
Les
relations extérieures de la Fédération
Anarchiste
*
Ce
texte prend le parti d'appeler toute personne en mouvement forcé
« réfugié.e », le terme « migrant·e »
étant déjà une façon de rejeter celles et
ceux qui cherchent refuge.
Le meurtre policier perpétré contre Georges Floyd le 25
mai 2020 est une illustration terrible des actions de la police de
par le monde. Le permis de tuer entre leurs mains est
régulièrement mis en pratique contre les plus pauvres,
les plus stigmatisés.
Mais les choses
changent : aujourd'hui, les populations peuvent filmer, et même
en direct ces horreurs. C'est d'ailleurs le cas de la mort de Geoges
Floyd qui entraîne du coup un soulèvement énorme
aux USA.
N'arrêtons pas
de filmer, de documenter et de dénoncer les exactions de la
police ! Il est important de rappeler que la police se sert des même
"techniques" en France, en Belgique, et que de nombreuses
personnes sont décédé.es suite à des
contrôles durant le confinement et avant. Comment ne pas relier
le meurtre de Georges Floyd à la mort d'Adama Traoré,
victime de la technique du placage ventral ? Depuis toujours la
police ne sert qu'à protéger le Capital, l’État,
les Bourgeois et les Possédants et à écraser
toute contestation qu'elle vienne de manifestations, des quartiers
populaires ou des mouvements sociaux et syndicaux.
La Fédération
anarchiste tient à apporter son soutien aux manifestants et
dénonce les violences policières qui sont en cours
partout dans le monde (États-Unis, Chili, Hong Kong, France,
...).
Nous devons nous
passer de la police ! Nous devons repenser notre société
pour qu'un corps d’État ne puisse plus jamais avoir la
légitimité de tuer et être couvert.
Les Relations
Internationales et les Relations Extérieures de la Fédération
Anarchiste
Et
maintenant, qu’est-ce qu’on fait ? Où est-ce qu’on
en est à présent ? Dans l’entre-deux du
confinement. Pas encore tout-à-fait déconfinés,
déconfinées. Pour ça, faudrait quand-même
le feu vert pour des retrouvailles sans barrière ni distance
avec la familles, les amis, et de se côtoyer dans les restos,
les bistros, les cinés, les théâtres, les
concerts. Et puis sans doute qu’il faudrait arriver à
comprendre les intérêts de chacun, de chacune. Jamais,
ou rarement, il n’a semblé aussi compliqué de
faire le tri. On vient de vivre un gros truc. Le machin qui tiendra
un peu de place dans les livres d’histoire. Peut-être pas
tant que ça finalement. Mais tout de même un peu. Une
fois dans l’histoire, la première, la population
mondiale, en grande partie, a été invitée à
demeurer confinée, c’est à dire à rester
enfermée chez soi, ce qu’elle a fait avec une docilité
qui pourrait rendre perplexe. Pas la population d’une ville,
pas la population d’un pays. Non, plus, beaucoup plus. Au 24
mars, le chiffre de 2,6 milliards de personnes a été
avancé (par exemple par LCIiciou
2,45 milliards par La
Tribuneici).
Cela signifie qu’en soi, la pandémie en elle-même
n’est pas tellement l’événement majeur,
mais bien plutôt le confinement généralisé.
D’autres pandémies ont eu lieu dans le passé,
aussi contagieuses, aussi meurtrières. Et d’autres
malheurs par
ailleurs.
Les guerres, les génocides et les famines, sur ce point,
conservent de très loin leur place en haut du classement. Ce
qui, par ailleurs, ne signifie pas que la pandémie ne
constitue qu’un aspect anecdotique des événements
toujours en cours. Indubitablement, la pandémie représente
le fait central : un virus transmis de l’animal à
l’humain (zoonose) a commencé à infecter une
quantité significative de personnes au début l’année
2020. Le foyer se situe à Wuhan, en Chine. La propagation du
virus à l’échelle a probablement été
favorisée par les moyens actuels de déplacement
(l’avion, en premier lieu). Jusque là, peut-on dire que
tout cela aurait pu être évité ? Pas sûr.
Pas sûr du tout. Du moins, cela dépend des critères
que l’on adopte. Il aurait fallu éviter de bonne heure
l’extension sans mesure de l’activité et de la
présence humaines, rognant sans cesse l’habitat naturel
d’espèces animales sauvages. On peut renvoyer à
une vidéo de Marc Bettinelli, publiée le 19 avril 2020
sur le site du journal Le
Mondeici.
Il aurait fallu changer de manière brutale et radicale les
modalités contemporaines de l’échange, du
commerce, de la consommation, de la mobilité, à
l’échelle planétaire. Autant dire : peine perdue.
De
plus en plus de gens sont tombés malades. Gravement. En Chine,
d’abord, on l’a dit, puis en Italie, puis dans toute
l’Europe et le monde entier. Des régions auront été
moins impactées que d’autres. C’est un autre fait.
Mais les pays d’Europe et les Etats-Unis ont senti un vent de
panique leur souffler dans les bronches en voyant qu’on avait
peut-être, dans le discours officiel des instances politiques,
minimisé la gravité de la maladie. Le corona virus, on
en meurt. Les personnes fragilisées, les plus âgées,
s’avèrent les plus en danger. La courbe des morts s’est
mise à grimper, en Italie, en Espagne, en France, en Belgique.
Le personnel soignant s’est retrouvé en première
ligne, subissant les conséquences d’une vingtaine
d’années de politiques néolibérales,
d’austérité, de réduction du personnel, de
restrictions et de coupes budgétaires. Tout cela aurait-il pu
être évité ? En grande partie, probablement. Il
aurait fallu refuser de considérer des secteurs prioritaires
comme l’éducation, la lutte contre les inégalités
sociales, et la sécurité sociale, à quoi il faut
rattacher le secteur des soins de santé, comme des secteurs
secondaires, ou susceptibles d’être soumis aux principes
de la rentabilité et de la compétitivité. Là
où le capitalisme voit des dépenses, il aurait fallu
parler d’investissement dans le capital humain. Encore que
l’expression
soit déplaisante au possible. Juste se demander : à
quoi sert la prospérité ? Non, mieux : à
quoi bonla
prospérité si l’éducation, la qualité
de vie de l’ensemble de la population, l’accès aux
soins de santé, ne demeurent pas l’objectif même à
atteindre ? Qu’est-ce qui demeure central, toujours et partout,
ici
et maintenant,
si ce n’est la santé, le bien-être, le savoir ? A
cet égard, la solidarité constitue à la fois le
moyen et le but, si l’on aspire à une société
où ces communs, ces biens, sont destinés à être
partagés avec le plus grand nombre. Et non réservés
à une élite. Pas même au mérite ! La
santé, le bien-être, le savoir sont des dus. Même
le pire des connards ou la pire des crapules ne devraient pas pouvoir
en être privés. Il faut aspirer à une solidarité
sociale qui ne laisse personne en arrière, et non à la
prospérité économique. Le
ruissellement, ça ne marche pas.
Beaucoup
de victimes à déplorer, à ce stade, on ne va pas
se cacher la vérité. Les chiffres ne dispensent pas de
penser. Mais on peut commencer avec eux, au moins pour se faire une
idée. Sans oublier tout
le reste.
Parlons pas de dommages collatéraux : le stress, l’épuisement,
la détresse, du personnel médical, des familles des
victimes… Ces gens qui ont du vivre leurs derniers moments
dans l’isolement… Les personnes atteintes d’autres
types de pathologie qui ont dû compter avec des services
débordés… Ces victimes là, pourra-t-on
les dénombrer un jour ? Celles et ceux, ouvriers, employés,
qui ont poursuivi une activité professionnelle dans un secteur
reconnu prioritaire, pour des raisons économiques
(entreprises) ou simplement parce qu’il s’agit de
commerces de première nécessité... Le personnel
a continué à bosser, on n’est pas certain du tout
que les conditions de sécurité sanitaire aient toujours
été respectées... Le chiffre de 75%
d’entreprises contrôlées qui s’avèrent
être en infraction est avancé par le journal Le
Soir
le 8 mai 2020 ici.
Les autres commerçants et commerçantes, ce qu’on
appelle les petites et moyennes entreprises, ou encore les petits
indépendants, au premier rang desquels le secteur Horeca, vont
probablement peiner considérablement pour rattraper la perte
énorme de la période de confinement. Si
seulement cela pouvait leur inculquer l’intérêt de
la lutte sociale et que nul n’a à y gagner dans
l’exploitation de la force de travail d’autrui !…
Quant
au secteur culturel, il s’apprête aussi à sortir
les grandes rames pour galérer - voire continuer à
galérer de plus belle : artistes,
comédiens, comédiennes…
L’école, qu’en dire ? Les gosses auront perdu une
partie de leur scolarité. On peut essayer de rattraper cela ou
se dire qu’ils auront peut-être appris autre chose de
cette période. A moins de se demander s'il n’est pas
temps de commencer à leur enseigner autre chose, et autrement.
Il
est possible de craindre un tsunami psychologique dans les semaines à
venir, conséquence des conditions de confinement (isolement,
stress, anxiété, deuils douloureux, conditions liées
au télétravail, etc.) comme indiqué dans un
titre de La Libre ici.
Bref, comme des cons, déconfiné·e·s, mais
pas sorti·e·s de l’auberge. Pas
de prise de position en l’occurrence, simplement un panorama
des craintes et des plaintes qu’on entend un peu partout, dans
toutes les couches de la société.
Les
conséquences de la crise risquent de se faire sentir
profondément, à plus d’un titre, et il est encore
trop tôt pour les calculer : accroissement des inégalités,
augmentation des troubles psychologiques liés au
confinement,... Une crise sociale et économique se profile à
l’horizon et la meilleure, c’est qu’en fait, ce
sera la conséquence d'une crise économique que les
gouvernements et le patronat comptent bien faire payer à la
population, à coup de nouvelles mesures d’austérité.
Parions que sous peu on va nous faire le coup d’en appeler à
notre civisme et à notre sens des responsabilités pour
accepter les sacrifices qui favoriseront hypothétiquement la
relance économique. Reprendre la croissance où on
l’avait laissée. Retour à la normale. On veut
bien qu’il a fallu suspendre une partie de l’activité
économique, mais maintenant ça suffit, il faut fermer
la parenthèse et repartir du bon pied. Tel
est le discours que la classe politique, dans son allégeance à
la FEB et au grand patronat, sert de bon cœur à une
population traumatisée, qui peine à penser l’exercice
de ses libertés dans de telles conditions. On a gardé
les bêtes à l’étable une grande partie du
printemps, elles trépignent à l’idée de
ressortir à nouveau. Et quand elles peuvent enfin retrouver le
plein air, ce qui les attend, c’est le joug et le labour. Et
les magasins.
Est-ce
qu’on n’aura rien appris de cette parenthèse ?
Est-ce qu’à la clé, on y trouve une forme de
prise de conscience des futur·e·s lésé·e·s
de l’affaire ? Faudrait donc penser qu’à l’inverse
du discours encourageant à la reprise, on trouve des paroles
de révolte, de colère, de rupture avec le modèle
qui nous a conduits là. Seulement voilà, on se trompe
en pensant qu’il suffit de dire que rien ne sera plus jamais
comme avant. Parce qu’il ne suffit pas de le dire, et
d’une, pour que cela se passe – c’est le travers du
performatif pathétique. Mais aussi, de deux, parce que c’est
oublier que beaucoup, beaucoup, vraiment beaucoup de monde appelle de
ses vœux un retour “à la normale”. Quelle
normale ? Les habitudes de consommation, de mobilité et de
loisirs, pardi (qui toutes reposent sur un certain mode de production
des biens) ! Les magasins, la bagnole, les sorties, et peut-être
même le travail, d’une certaine façon. On risque
donc bien de n’avoir rien appris, de tout ça. Sauf
peut-être sur soi-même. Mais celles et ceux-là
savaient déjà qu’ils et elles aspiraient à
sortir de la société de consommation, des énergies
fossiles, du stress, du bruit, de l’esclavage salarial, de la
pollution, du gaspillage, de la maltraitance environnementale, des
inégalités sociales, de l’éducation qui
les reproduit, des inégalités de richesse qui les
entretient, et de l’absence d’alternative politique pour
favoriser la révolution sociale. “Après le Covid,
la colère”, et puis après ? On va aller vers où,
vers quoi ? Mettons que la colère soit largement partagée,
dans la population, depuis les plus démunis jusqu’à
la classe moyenne supérieure ? Déjà ça,
c’est pas gagné. Parce que tout le monde n’est pas
en colère pour les mêmes raisons, et n’aspire pas
aux mêmes solutions. Parce que pour certains, le retour à
la normale, c’est avant tout aussi le retour d’un certain
nombre de privilèges (qui n’avaient pas été
complètement perdus, n’est-ce pas, juste suspendus dans
le pire des cas). Alors on laisse de côté les classes
moyennes supérieures ? Voire les classes moyennes dans
leur ensemble ? Et on vise quoi, on vise qui ? Seulement les
classes laborieuses et les chômeurs ? Il y a fort à
craindre que ça fasse pas grand monde, au final. Il importe de
bien se poser la question : cette crise est-elle un catalyseur ? Et
si oui, de quoi ? Et pour qui ?
Par
décence, il ne pourra pas être dit que la pandémie
aura eu de bons côtés. La pandémie en elle-même,
non. Bien entendu. Tout en nous se révolte à l’idée
même de le penser. Mais le confinement, demandions-nous plus
haut ? Mais la mise à l’arrêt de la frénésie
de nos comportements en matière de consommation, de mobilité,
de production, de loisirs / divertissements
? D’accord, on
a mis sur pause et ça a eu du bon.
La
pollution a diminué de manière considérable,
comme
le signalent les observations de l’Agence spatiale européenne,
ici.
Pollution sonore, aussi. Mais
si rien ne change ? Une minorité (composée
d’adeptes de la décroissance et de contestataires) se
retrouve au pied du mur, contrainte
par ce retour à la normale à sacrifier, oublier,
abandonner, mettre au rencart une bonne fois pour toutes ce moment
suspendu où les bagnoles et les avions ont interrompu
provisoirement leur va et vient frénétique. Reprendre
chacun sa place dans le trafic. Rappelons que le 1% à qui
profite ce mode de vie, reposant sur le travail d’autrui, ne
subit pas l’inconfort des files d’attente et des
embouteillages. Et quand ça se produit, ce n’est pas de
la même façon. Retrouver les caddies remplis de denrées
emballées, suremballées, importées de loin,
voire de très loin, mais pour pas cher parce que la main
d’oeuvre, là-bas,
c’est pour rien. Retrouver le chemin du travail, avec ses
horaires, son métro, ou auto, boulot, dodo, ses relations
hiérarchiques toxiques et malveillantes, mais en fait,
par-dessus tout, la contrainte d’y passer un temps dingue à
y faire quelque chose, qu’on aime ou qu’on n’aime
pas, pour gagner de l’argent (qui permet de rembourser les
crédits), sans pouvoir consacrer ce temps-là à
reprendre le pouvoir sur sa propre existence. Perdre sa vie à
la gagner, air connu. Mais toujours si peu contredit ! Cette
nécessité impérieuse du temps d’occupation
du travail relève de l'évidence la moins remise en
question, sans doute parce qu’on craindrait trop de se demander
si l’on trouverait à quoi s’occuper sans cela. Le
confinement a été contraint, par décision
politique, en se fondant sur le
ressort de la peur,
principalement. Et en jouant sur celui de l’autorité
des experts.
Les libertés fondamentales ont été suspendues,
et la docilité des populations a été eu
rendez-vous. Qui aurait cru cela possible : suspendre toutes nos
activités quotidiennes, travail école, consommation,
mobilité, rassemblement, etc. ? On dira : il a bien
fallu. Oui, il a bien fallu. Peut-être existait-il des
alternatives. Dans l’urgence, pour soulager les travailleurs et
travailleuses de la santé, il a bien fallu faire preuve de
responsabilité. Mais nous autres anarchistes, nous pensons que
de telles décisions pourraient être prises par
consensus, en assemblées, sur le mode du communalisme
libertaire par exemple. Non sur le mode de la posture martiale
(« Nous sommes en guerre ») ou de l’autorité
bienveillante (« C’est pour votre bien »).
A
quoi conduit l’obéissance, tout de même.
Certainement pas à la rupture en tout cas. Et maintenant,
qu’est-ce qu’on fait ? Rester chez soi, pour y disposer
d’un temps de loisir de qualité ? Le confinement n’aura
pas pu nous l’apprendre parce que c’est arrivé
sous contrainte. Et parce que le télétravail a rattrapé
bon nombre des confinés, assignés à résidence
avec nécessité de continuer à rendre des comptes
à un employeur. Oui,
nous sommes ou serons bientôt libres de circuler à
nouveau, de nous rassembler, de nous réunir. Mais nous
retrouvons aussi tant d’obligations, d’impératifs,
d’ordre établi. La distanciation des contraintes ?
Le volet positif de la soi-disant « distanciation
sociale ». Oui, aux yeux de certain·e·s, le
confinement aura représenté une opportunité,
peut-être provisoire, peut-être illusoire, de bousculer
l’ordre établi.
Le
confinement nous aura-t-il appris la décroissance ? Non,
certainement pas. Parce que la décroissance, c’est pas
ça. On résume souvent par le slogan : “Moins de
biens, plus de liens.” Or les liens, justement, c’est là
que le bât a blessé. SI seulement on arrivait à
se dire que ce ne sont pas les magasins qui nous ont manqué,
mais que c’est de pouvoir rencontrer la famille, les amis, les
serrer dans nos bras, leur taper sur l’épaule, ou
d’aller au théâtre, au cinéma ou au bistro,
à la bibliothèque, au foot ou au resto... Peut-être
ainsi sortirions-nous un peu grandi·e·s de l’épreuve.
Et bien décidé·e·s à affronter
tout ce qui limite notre faculté à faire société
de manière solidaire.
Pour
préparer le terrain d’un futur changement, appeler à
l’insurrection est vain. Puéril même. Le temps de
la propagande par l’écrit et par l’exemple est
venu. En constituant à de petites échelles, parfois
simplement au niveau de la cellule familiale, avec des collectifs,
des groupes de quartier, des expériences alternatives, il se
peut que l’inspiration en gagne d’autres. Cela ne peut et
ne doit exclure d’autres voies, résolument collectives à
l’échelle sociale. Mais il ne saurait être
question d’attendre ce changement pour commencer à le
vivre, même partiellement. C’est une question de
désobéissance individuelle. Et aussi d’honnêteté
et d’intégrité. Et maintenant, alors, qu’est-ce
qu’on fait ? On va commencer par énoncer ce qu’on
ne veut plus, de quoi on ne veut plus, et de quoi demain pourrait
être fait. Et au lieu d’écrire un programme, il
convient d’expérimenter localement des modes de vie
en rupture avec les habitudes de consommation, de mobilité, de
loisirs, de politique aussi, qui entretiennent l’illusion
de la croissance et de la production comme vecteurs de la prospérité.
L’anarchisme en cela est une pensée éminemment
dynamique. Elle n’est pas figée, elle ne se
recroqueville pas sur un programme, ou sur des modèles ou des
autorités doctrinales passées ou présentes. Elle
est par nature expérimentale. Elle teste, s'adapte, obtient
des succès, se trompe aussi parfois. Et quand elle se trompe,
elle tâche de tirer parti de ses erreurs. On ne sait pas
répondre avec précision, quand on est anarchiste, à
la question : et maintenant qu’est-ce qu’on fait ? Car la
réponse n’est pas écrite à l’avance.
Elle s’écrit en cours de route, en chemin, en
expérimentant la liberté, l’égalité
et la solidarité, sans maître ni dieu. Vers une société
juste, sans pouvoir ni privilèges, mais privilégiant
les capacités de chacune et chacun, dans le respect de
l’environnement et de l'humain.
Chélidoine.
Groupe
Ici et maintenant de la Fédération anarchiste
Aujourd’hui, la priorité est à la santé de
toutes et tous. Demain il faudra nous délester de ces
gouvernements d’amateurs qui mettent à mal nos sociétés.
En attendant, pour
aider à faire face à cette situation inédite de
confinement, d’isolement ou de solitude presque partout dans le
monde, l’équipe du Monde Libertaire met en accès
libre l’ensemble de ses publications !
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