Ici et maintenant

Groupe belge de la Fédération anarchiste

Les anarchistes - "On ne les voit jamais que lorsque..."

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On l’avait déjà écrit une autre fois. Les anars, apparemment, semblent être à la mode dans le monde culturel et associatif. On crache pas dessus, faut pas croire. Au contraire, d’ailleurs : on s’en réjouit ! Attendez pas de nous qu’on joue les rabat-joie ou, encore pire, les gardiens du temple et de l’orthodoxie. L’anarchisme appartient à toutes et tous. Enfin, entendons-nous : le Cercle Proudhon, on lui aurait bien dit « Pas touche ! » En fait on lui aurait même bien dit autre chose. « Merde », par exemple.

On ne dira donc pas « Merde » à ces alliés culturels et associatifs. On peut parler d’elleux gentiment, sans crainte qu’on nous dise qu’on leur passe la brosse à reluire puisque on ne les connaît pas personnellement, seulement de nom. Peuple & Culture et Barricade (associations basées à Liège, subsidiées pour exercer sur le terrain des activités d’éducation permanente), par exemple, brassent le filon de bon cœur : tant mieux, redisons-le. Deux dates prévues : le jeudi 8 février 2024 de 18h à 20h30, ces deux ASBL proposent une soirée-conférence introductive aux anarchismes suivie d’un échange pour aiguiser les regards critiques sur les idées anarchistes. (On fait juste un quasi copié-collé, manière de pas s’attirer des emmerdes !) Une semaine plus tard : le jeudi 15 février 2024 de 18h à 20h30, le même binôme associatif invite à une soirée de découverte de l’outil « La Revanche des anars » avec plusieurs tables de jeu. Le créateur du jeu sera présent, Stéphane Jonlet, issu de l’écurie de la laïcité organisée et chercheur au Centre interdisciplinaire d'étude des religions et de la laïcité de l'Université libre de Bruxelles.

A Philippeville, par ailleurs, la Maison de la Laïcité organise un apéro-rencontre le 20 février prochain, au cours duquel « nous discuterons ensemble des expériences concrètes qui pourraient être qualifiées d’anarchistes en mobilisant l’anthropologie de David Graeber, théoricien de la pensée libertaire nord-américaine. » (Caramba ! Encore un copié-collé !)

Que de beaux events (salut Marc Z. et merci d’être venu !) fleurissent allègrement, dirait-on, dans lesquels les mots « anarchistes » et « anarchisme » sont même écrits en toutes lettres. L’avons-nous dit ? Nous n’en prenons pas ombrage, le moins du monde, au contraire. La preuve, nous faisons bien cordialement la pub de ces moments de rencontre bien sympathiques. Au demeurant, nous aurions tort de cracher dans la soupe, vu que la même Maison de la Laïcité de Philippeville nous a fait l’honneur et la gentillesse de nous inviter en novembre 2023 pour animer une causerie et même vendre nos bouquins. Et nous avons collaboré avec Barricade à plusieurs reprises. C’est plutôt notre propre mea culpa que nous allons faire ci-après.

Quand on est à court d’inspiration pour évoquer l’anarchisme, nous avons ce couplet sous la main, que nous ressortons nous-mêmes, hélas, un peu à tort et à travers : « Y en a pas un sur cent et pourtant ils existent ! » Mouais… Les temps ont changé. Les anars ne sont toujours pas plus nombreux·ses, suppose un peu. Et pourtant, voilà qu’on parle de l’anarchisme, au plein jour et à des heures de grande écoute. C’est évidemment parce que désormais on le sait : les anarchistes ne se résument pas à la bande à Bonnot. Mouais, mais enfin, tout de même : Germaine Berton a flingué un type (une crapule), Alexandre Berkman a tiré sur un type (une autre crapule)…

Ce que nous voulons dire, en somme, c’est ceci. Nous-mêmes, anarchistes membres d’une organisation reconnue (la Fédération anarchiste), à force de jouer la carte de la respectabilité, de sortir de l’ombre pour nous doter d’une visibilité, de participer à des causeries en partenariat avec des associations ayant pignon sur rue, est-ce que nous n’avons pas contribué à édulcorer la portée révolutionnaire de notre message ? Oui, nous allons poliment dans des cénacles cultivés parler des mérites comparés d’Emma Goldman et d’Élisée Reclus, ou des bourses du travail de Pelloutier. Mais quoi ? L’anarchisme est aussi, d’abord un mouvement révolutionnaire. Pour de vrai. L’idée reste de balayer le vieux monde. De rompre avec des siècles d’obéissance, de salariat, d’exploitation, et ce par tous les moyens. Y compris la violence. La chanson de Ferré, elle est bien. Mais faut l’écouter jusqu’au bout : « On ne les voit jamais que lorsqu’on a peur d’eux ! »

Pour le coup, c’est juste une question, pas une condamnation. Une question à se poser. Peut-être n’y a-t-il pas de réponse, d’ailleurs. A force de privilégier la voie culturelle, associative, pour diffuser notre message d’insoumission, de liberté, d’autogestion, de refus de toute autorité, est-ce que… est-ce que nous autres anarchistes n’avons pas aussi un peu cessé de faire peur ?

Alphonse d’Enletat, groupe Ici & Maintenant (Belgique) de la Fédération anarchiste

Apéro-débat : Le charme (in)discret du capitalisme

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Apéro-débat - Le charme (in)discret du capitalisme / Mardi 14 novembre à 18.30 @Bibliothèque de Florennes - Av. Jules Lahaye 4, 5620 Florennes • en partenariat avec le groupe Ici & Maintenant de la Fédération anarchiste (suivre notre actu sur Insupportable)

Avant toute chose, le capitalisme est un dispositif économique, un système instaurant la propriété privée des moyens de production et la liberté de concurrence. Ce système est par ailleurs émaillé d’affects qui lui sont liés, à tort ou à raison, caractérisant une organisation sociale et des attitudes que tout un chacun adopte plus ou moins inconsciemment.

Le capitalisme, c’est brillant, clinquant, bling bling. De manière détournée, il nous glisse des affects, induit des dépendances, stimule des désirs. Le capitalisme a du charme, et ça saute aux yeux, ça donne envie. Mais tout cela a un coût : inégalités sociales, compétition, impact environnemental, etc. Et à cela, il conviendrait de répondre affect pour affect. Sommes-nous encore en mesure de nous affranchir des dépendances de la société capitaliste ? Pouvons-nous rêver d’une société aussi désirable que celles qui ont succombé à l’attrait du capitalisme ? Avons-nous encore des valeurs de solidarité à transmettre aux jeunes générations ?

Retrouvons-nous pour en discuter autour d’un verre le mardi 14 novembre à 18.30 à la bibliothèque de Florennes.

Animé par Christophe De Mos, du groupe Ici & Maintenant de la Fédération Anarchiste

Renseignements et inscriptions

071/66.67.78 – 0496/32.97.09

cercle.humaniste@outlook.com


Maxime Prévôt paye sa tournée au Café du Commerce

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« La lutte contre l’extrémisme fait partie de notre ADN… Namur est un territoire de mémoire, membre du réseau, une ville solidaire et hospitalière, raison pour laquelle il nous faut combattre toutes les idéologies extrêmes ! Qu’elles soient d’extrême-droite, bien-sûr, mais aussi d’extrême-gauche anarchiste, qu’il s’agisse de fondamentalisme religieux, d’exaltation du complotisme, de désobéissance civile à tout va, ou encore l’intégrisme environnementaliste tel que l’on a pu parfois l’observer avec des gens qui se collent à des œuvres d’art, et cetera... »

Maxime Prévôt, bourgmestre de Namur, parti « Les Engagés », conseil communal du 21 mars 2023

https://www.youtube.com/watch?v=CTCO70NYynU&t=1633s (voir à 25’50’’)

Au départ de cette tirade pantalonnesque, il y a une affaire assez sérieuse. En effet, depuis quelques semaines, les imposteurs du parti d’extrême-droite « Chez Nous » se sont employés à tenter de se taper l’incruste dans plusieurs villes de Wallonie : Gilly, Namur, Cuesmes… A chaque fois, ils ont bénéficié de l’accueil qu’ils méritaient : un comité de réception composé de toutes celles et ceux qui ont en horreur les idées haineuses et violentes de l’extrême-droite était rassemblé. Pas de fachos dans nos quartiers, dans nos rues, dans nos villes ! Ce bel élan de tous·tes les antifascistes, organisé·e·s ou non, de toutes les régions a permis de dégager à chaque fois les pitres du parti « Chez Nous » [tout comme, récemment encore, du côté de Ciney, le 16 avril dernier, les baudruches gonflées au gaz ultra-réactionnaire de l’organisation « Civitas »].

Forte de cette impulsion, la ville de Charleroi a adopté une motion la déclarant « ville anti-fasciste », tandis qu’une telle motion était déposée par le collectif Namur Anti Fasciste au Conseil Communal de la Ville de Namur le 21 mars dernier. Le grand mamamouchi de Prévopolis, Maximus 1er a pris tout le monde de cours avec une tirade d’une affligeante mauvaise foi et pour tout dire, d’une grande bêtise. Mauvaise foi ou malhonnêteté intellectuelle ? Ou méconnaissance crasse de la complexité politique des mouvements sociaux, environnementaux ou religieux ? Une chose est sûre : des comme ça, même au comptoir du Café du Commerce, on ne les osait plus depuis belle lurette !…

Au-delà des lieux communs consternants, on peut tout de même se questionner sur une manière de communiquer aussi déplorable, annonciatrice d’une possible dérive sécuritaire. Ah bah oui, suppose un peu : tous les extrêmes se rejoignent et se valent, à en croire le roitelet bâtisseur de la capitale de la Wallonie. Allez, dans la même fournée « l’extrême-gauche anarchiste » et les « fondamentalismes religieux » qui déjà, non seulement n’ont aucun rapport entre eux, mais n’en ont pas d’avantage avec l’extrême-droite. Allez, c’est ma tournée, semble s’exalter notre petit baronnet local, j’ajoute dans le même sac « l’exaltation du complotisme » et « la désobéissance civile… à tout va »… « A tout va »… On croit rêver, n’est-ce pas, en entendant un maïeur s’exprimer comme un pâle pilier de bistro maniant une verve populiste plus ou moins avinée… Pour un peu, on y verrait le pendant, dans un autre registre, d’un « tout ça, c’est magouille et compagnie ! »

Enfin, un petit dernier pour la route, le calife namurois place une dernière petite pique vers « l’intégrisme environnementaliste », comme on l’a vu, se sent-il obliger de préciser. Encore de la désobéissance civile à tout va, sans doute !…

Pas besoin d’avoir fait science-po pour souligner combien cette confusion de diverses tendances et mouvances – sociales, politiques, écologistes, religieuses (on ne sait pas trop dans quelle catégorie classer l’exaltation du complotisme…) - se fonde sur de l’approximation, des raccourcis et, encore plus probablement, un opportunisme électoraliste censé rassurer la bonne citoyenne, le bon citoyen. Tout va bien, bonnes gens, votre administration veille sur vous, on ne laissera pas des marginaux faire la loi… !

Il va de soi que pour nous, anarchistes, les hasardeuses affirmations du maïeur namurois sont non seulement périlleuses, mais encore elles sont insultantes. Pour sûr, on nous ressortira peut-être la vieille tarte à la crème des « attentats anarchistes » (Ravachol, Vaillant, etc.) ou des « illégalistes » (ah la « bande à Bonnot »!) pour souligner la dangerosité du mouvement libertaire. Pour authentique que soient ces faits, nous n’avons pas le sentiment d’avoir la moindre affinité avec les fondamentalismes religieux ni avec l’exaltation complotiste. Ces deux tendances font systématiquement référence à des autorités et gourous plus ou moins autoproclamés. Les anarchistes invitent hommes et femmes à s’en passer résolument. Il n’y a en outre rien de comparable entre des faits de violence imputés aux anarchistes (il y a plus de cent ans…) et la violence criminelle des fanatiques religieux. Quant aux mouvances complotistes, aucune tendance politique, aucune couche sociale n’est épargnée par sa contagion. Le mouvement anarchiste a pour sa part régulièrement appelé à se méfier de ces mouvances presque systématiquement animées par des idéologies ultra-réactionnaires, ultra-conservatrices et, pour tout dire, fascisantes.

Par ailleurs, le fait que les anarchistes aient depuis toujours été de fervent·e·s partisan·e·s de l’écologie ne fait pour autant d’eux ni d’elles des intégristes environnementalistes. En revanche, il est vrai de dire que nous, anarchistes, ne refusons pas de nous associer à des manifestations de désobéissance civile, y compris s’il s’agit de protection de l’environnement, dès lors qu’il s’agit de favoriser une société respectueuse de l’humain et de la nature.

Enfin, last but not least, nous, groupe Ici & Maintenant, récusons catégoriquement cette affirmation péremptoire plaçant sur un même pied l’extrême-droite et l’anarchisme. D’une part parce que cela montre une méconnaissance profonde des réalités et de la complexité des différents courants du mouvement libertaire. Pour autant, aucun « méfait » attribuable à des anarchistes ne peut venir concurrencer les atrocités commises au nom de l’idéologie d’extrême-droite sous tous ses avatars, depuis les exterminations de masse jusqu’aux lynchages et aux ratonnades. D’autre part, les anarchistes ont toujours été parmi les premiers et les premières à se mettre en danger quand il a fallu, par le passé, et encore aujourd’hui, s’opposer aux affidés des partis fascistes, et lutter contre les replis identitaires, les réflexes réactionnaires, la xénophobie, le culte du chef, de l’autorité et de la nation, l’appel à la violence, l’homophobie, les visions passéistes du statut des femmes, etc.

Il faudrait sans doute passer sous silence les universités populaires, les bourses du travail, les associations syndicales, les mutuelles, les sociétés coopératives, les établissements pionniers de la pédagogie active et bienveillante, les œuvres de solidarité internationales, etc. s’il fallait à tout prix s’assurer de la violence dont « l’extrémisme anarchiste » est porteur… Rappelons enfin que résister à l’oppression ne relève pas de la violence. C’est un devoir. Et c’est ce devoir que, de tout temps, les anarchistes ont eu à coeur d’accomplir, contre toutes les formes d’exploitation, qu’elles soient fascistes ou capitalistes.

Alphonse d’Enletas
groupe Ici & Maintenant (Belgique) de la Fédération anarchiste




Rencontres Elisée Reclus : ça passe ou ça CAL...e !

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On nous souffle dans l'oreillette que les imposteurs de service du Centre d'Action Laïque, organisation avérée maltraitante à plusieurs reprises envers ses employé·e·s, incarnation du militantisme subsidié, petit-bourgeois et social traître, lance une série de rencontres baptisées « Rencontres Élisée Reclus ».

On dira ce qu'on voudra, y a pas de copyright sur le nom du célèbre géographe, auteur de la Nouvelle Géographie Universelle (en 19 volumes), ancien de la Commune de Paris, anarchiste convaincu. Mais tout de même, ça fait un peu bisquer !... Pour une association qui bénéficie de subsides de l’État, on imagine que ça doit faire un brin canaille de se placer sous le patronage d'un savant engagé, à la réputation sulfureuse, en son temps. Tant son neveu Paul que son frère Elie et lui-même furent soupçonnés par la flicaille et la bonne société bourgeoise d’avoir encouragé l’anarchiste Vaillant à lancer une bombe dans le Palais Bourbon, le 9 décembre 1893.

Pour autant, qu'on le sache ou non, Reclus n'avait pas été le bienvenu, en 1894, lorsqu'il avait été question de lui offrir la chaire de géographie de l'ULB... A tel point qu'une sécession d'étudiants et d'une poignée d'enseignants avait donné lieu à la création d'une institution rivale, l'Université Nouvelle.

Pour le coup, le CAL, organisation fossile et dinosauresque, semble subitement trouver judicieux de s'emparer de la thématique de la lutte contre les atteintes à l'environnement. On imagine d'ici les grisonnants des CA bavouiller sentencieusement que « ça intéresse les jeunes » et l'une ou l'un deux, de se rappeler que tonton Reclus aujourd'hui n'épouvante plus, puisque même France Culture l'intitule désormais « précurseur de l'écologie »... !

Bref, Élisée Reclus se retourne-t-il dans sa sépulture du cimetière d'Ixelles en apprenant qu'on donne son nom à une série de rencontres se tenant sous les auspices d'une institution qui continue de se braquer contre le port du voile par des femmes adultes (en référence notamment à la tierce opposition contre l’ordonnance du tribunal du travail condamnant la Stib pour discrimination à l’embauche à l’égard d’une femme portant le voile). Tout en prônant une multiculturalité universaliste à la papa, fleurant bon son paternalisme post-colonial…

C’est aussi au CAL (régionale de Namur) qu’on a vu une direction maltraitante lever la main sur une ouvrière, exercer une autorité despotique sur une équipe contrainte de s’écraser sous la menace et l’intimidation. Ces faits sont tout à fait avérés. Certes l’individu, un certain Fabrice Jamar, a été invité à quitter ses fonctions après coup, suite à la mobilisation unanime des salarié·e·s. Des sanctions ? Aucune. Mieux : on a vu peu de temps après ces faits bien connus ledit individu présenter une « conférence » à la Maison de la Laïcité de Namur… ! Au CAL, on copine, on se protège… mais pas les larbins, bien entendu. Et puisqu’on n’en est pas à une farce près, ce petit tyran, affidé du parti socialiste, s’avère avoir commis, avec l’aide de deux complices, une vague brochure intitulée… « Graine de coach, l’attitude coach pour tous »… ! On pourrait en rire si ce n’était emblématique de ce que peut occasionner le clientélisme sordide de toutes les cliques réformistes.

C’est cette même régionale du CAL qui, récemment, a licencié une employée parce qu’elle n’était pas en mesure de répondre, eu égard à sa situation familiale (deux enfants en très bas âge), aux exigences de la direction, à savoir passer plusieurs journées et nuits d’affilée en stage résidentiel durant plus d’une semaine. Tiens, tiens… Qui parle de bonheur a souvent les yeux tristes, dit le poète… Et qui parle de féminisme conserve souvent les pires travers du patriarcat, à ce qu’il semble. Pourtant, au CAL, on se prétend résolument féministe… Seulement voilà, il ne suffit pas d’avoir pour présidente une femme pour abolir le patriarcat et ses dispositifs les plus sournois : il faut aussi que les actes suivent !

Bon… qu’on se rassure ! C’est pas parce qu’on tire à boulets rouges (et noirs!) sur une association progressiste (ou, en tout cas, intitulée telle) que nous allons subitement cirer des pompes du côté du Centre Jean Gol !… Entre deux maux, nous hésitons toujours à choisir le moindre. Nous, anarchistes, préférons rappeler que d’autres voies existent que celles du moindre mal. Ces voies sont celles que des penseurs comme Élisée Reclus, Pierre Kropotkine et Emma Goldman recommandaient pour établir les bases d’une société juste, d’égales et d’égaux. Explorer ces voies demeure notre priorité aujourd’hui. Pas besoin de s’autoproclamer Cercle Elisée Reclus, ou Groupe Kropotkine pour cela. Juste œuvrer, modestement, à favoriser l’avènement de la révolution sociale, ici et maintenant.

Alphonse d’Enletas
groupe Ici & Maintenant (Belgique) de la Fédération anarchiste



Lectures anarchistes • Victor Serge, le révolté permanent

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Lectures anarchistes Victor Serge, le révolté permanent

Notre compagnon Jean Lemaître propose sur le site du groupe Ici & Maintenant (Belgique) de la Fédération anarchiste, une série de chroniques littéraires que nous allons égrener au cours des mois prochains.

Lecture anarchiste : Victor Serge, « Mémoires d’un révolutionnaire (1905-1945) », Éditions Lux, 2017

Pas de socialisme sans respect des libertés et des droits humains fondamentaux !

Cela faisait déjà un certain temps que j'avais entendu parler de ce militant, sans jamais approfondir. Alors, pour faire plus ample connaissance, j'ai commencé par ses mémoires.

J'en sors émerveillé : tant de sincérité dans le récit, de témoignages inédits, de fidélité à ses idées, d'engagement lucide et critique, de courage personnel.

Fils d'émigré russe ayant fui la dictature tsariste, Victor Serge est né à Bruxelles en 1890. Autodidacte, féru de lectures, curieux de tout, fibre sociale chevillée au corps, assoiffé d'action, il épouse le camp anarchiste. Il exerce tous les métiers. Part en France. Y fait de la prison. Libéré en 1919, il rejoint la Russie bolchevique, au pire moment, en pleine guerre civile, alors que le pouvoir révolutionnaire vacille sous les assauts des armées « blanches ».

Victor Serge ne tergiverse pas. Se réunir sur l'essentiel, tel est son credo. C''est ainsi qu'il prend lui-même les armes et accède ensuite à d'importantes responsabilités au sein du Komintern. Et va déchanter. Il s'inquiète des excès de la Tcheka, la police extrajudiciaire, créée avec la bénédiction de Lénine, qui exécute à tours de bras. Il s'insurge contre la répression sanglante des marins anarchistes de Cronstadt, menée de main de fer par Trotski.

Les bolcheviques ont vaincu. La paix est recouvrée. Mais pourquoi diable le nouveau pouvoir multiplie-t-il les exactions, réprime-t-il de plus belle toute dissidence, qu'elle émane des anarchistes, des mencheviks, des sociaux-révolutionnaires et bientôt des rangs même des bolcheviques ? La redoutable Guépéou a succédé à la Tcheka. La répression gagne chaque jour en intensité. L'autoritarisme se muant en totalitarisme.

Lui-même, Victor Serge devient un paria. Un temps, il se solidarise avec Trotski, qui réclame plus de démocratie, et ne doit son salut qu'à l'exil. Mais Victor Serge ne tarde pas à se distancier du "Vieux", pour ses excès dirigistes et son propre sectarisme. C'était inévitable. Serge est arrêté, rudement interrogé. Il ne cède rien. Il est déporté dans l'extrême-Est soviétique. Sa chance ? En 1935, tournant stratégique de l'Internationale communiste, Moscou cherche à sortir de son isolement diplomatique et, tandis que la terreur atteint un degré inégalé en URSS, l'Union soviétique fait patte de velours auprès des démocraties bourgeoises occidentales.

En France et en Belgique, des voix, et non des moindres - Émile Vandervelde en tête - exigent et obtiennent, presque un miracle, la libération de Victor Serge, lequel, après une escale en Belgique et en France, où il est vilipendé de toutes parts, par les staliniens, par la droite réactionnaire, choisit l'exil au Mexique.

Victor Serge constate : « Quelle que soit la valeur scientifique d'une doctrine, du moment qu'elle devient gouvernementale, les intérêts de l’État ne lui permettent plus l'investigation désintéressée, et son assurance scientifique même la conduit (...) à se soustraire à la critique par les méthodes de la pensée dirigée, qui est davantage la pensée étouffée ». Tout est dit. Un homme à part, un homme clairvoyant et conséquent, un homme rare. Aux convictions plus que jamais actuelles !

Jean Lemaitre
groupe Ici & Maintenant

https://jeanlemaitre.com

Pour plus d’informations, on pourra se reporter à la fiche très détaillée consacrée à Victor Serge dans le Maitron en ligne :

http://maitron-en-ligne.univ-paris1.fr/spip.php?article50075m

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