Lectures
anarchistes • Victor
Serge,
le révolté permanent
Notre
compagnon Jean Lemaître propose sur le site du groupe Ici &
Maintenant (Belgique) de la Fédération anarchiste, une
série de chroniques littéraires que nous allons égrener
au cours des mois prochains.
Lecture
anarchiste : Victor
Serge, « Mémoires d’un
révolutionnaire (1905-1945) », Éditions
Lux, 2017
Pas
de socialisme sans respect des libertés et des droits humains
fondamentaux !
Cela
faisait déjà un certain temps que j'avais entendu
parler de ce militant, sans jamais approfondir. Alors, pour faire
plus ample connaissance, j'ai commencé par ses mémoires.
J'en
sors émerveillé : tant de sincérité
dans le récit, de témoignages inédits, de
fidélité à ses idées, d'engagement lucide
et critique, de courage personnel.
Fils
d'émigré russe ayant fui la dictature tsariste, Victor
Serge est né à Bruxelles en 1890. Autodidacte, féru
de lectures, curieux de tout, fibre sociale chevillée au
corps, assoiffé d'action, il épouse le camp anarchiste.
Il exerce tous les métiers. Part en France. Y fait de la
prison. Libéré en 1919, il rejoint la Russie
bolchevique, au pire moment, en pleine guerre civile, alors que le
pouvoir révolutionnaire vacille sous les assauts des armées
« blanches ».
Victor
Serge ne tergiverse pas. Se réunir sur l'essentiel, tel est
son credo. C''est ainsi qu'il prend lui-même les armes et
accède ensuite à d'importantes responsabilités
au sein du Komintern. Et va déchanter. Il s'inquiète
des excès de la Tcheka, la police extrajudiciaire, créée
avec la bénédiction de Lénine, qui exécute
à tours de bras. Il s'insurge contre la répression
sanglante des marins anarchistes de Cronstadt, menée de main
de fer par Trotski.
Les
bolcheviques ont vaincu. La paix est recouvrée. Mais pourquoi
diable le nouveau pouvoir multiplie-t-il les exactions, réprime-t-il
de plus belle toute dissidence, qu'elle émane des anarchistes,
des mencheviks, des sociaux-révolutionnaires et bientôt
des rangs même des bolcheviques ? La redoutable Guépéou
a succédé à la Tcheka. La répression
gagne chaque jour en intensité. L'autoritarisme se muant en
totalitarisme.
Lui-même,
Victor Serge devient un paria. Un temps, il se solidarise avec
Trotski, qui réclame plus de démocratie, et ne doit son
salut qu'à l'exil. Mais Victor Serge ne tarde pas à se
distancier du "Vieux", pour ses excès dirigistes et
son propre sectarisme. C'était inévitable. Serge est
arrêté, rudement interrogé. Il ne cède
rien. Il est déporté dans l'extrême-Est
soviétique. Sa chance ? En 1935, tournant stratégique
de l'Internationale communiste, Moscou cherche à sortir de son
isolement diplomatique et, tandis que la terreur atteint un degré
inégalé en URSS, l'Union soviétique fait patte
de velours auprès des démocraties bourgeoises
occidentales.
En
France et en Belgique, des voix, et non des moindres - Émile
Vandervelde en tête - exigent et obtiennent, presque un
miracle, la libération de Victor Serge, lequel, après
une escale en Belgique et en France, où il est vilipendé
de toutes parts, par les staliniens, par la droite réactionnaire,
choisit l'exil au Mexique.
Victor
Serge constate : « Quelle que soit la valeur
scientifique d'une doctrine, du moment qu'elle devient
gouvernementale, les intérêts de l’État ne
lui permettent plus l'investigation désintéressée,
et son assurance scientifique même la conduit (...) à se
soustraire à la critique par les méthodes de la pensée
dirigée, qui est davantage la pensée étouffée ».
Tout est dit. Un homme à part, un homme clairvoyant et
conséquent, un homme rare. Aux convictions plus que jamais
actuelles !
Jean
Lemaitre
groupe Ici & Maintenant
https://jeanlemaitre.com
Pour
plus d’informations, on pourra se reporter à la fiche
très détaillée consacrée à Victor
Serge dans le Maitron en ligne :
http://maitron-en-ligne.univ-paris1.fr/spip.php?article50075m
A Glasgow, la COP 26
s'avère riche de futures promesses non tenues, sur les
problématiques environnementales, sur la nécessité
de questionner l'impact de l'activité humaine sur les
écosystèmes, sur les inquiétudes liées au
dérèglement climatique. Pourtant - et là, on
fait un crossover de malade ! -, il y a un sujet qui demeure en
suspens alors qu'il y a quelques décennies encore, il
mobilisait des centaines de milliers de personnes à Bruxelles
(1983) : nous avons nommé l'arsenal nucléaire
mondial... 11 novembre oblige (un crossover de malade, on vous dit
!), il est urgent de rappeler les fondamentaux des luttes
antimilitaristes et pacifistes, qui seront largement absentes des
débats à Glasgow. Bien que tout semble nous inciter à
un lénifiant oubli, jamais la menace n'a été
aussi présente…
Récemment,
nous avons eu l'opportunité de réaliser une interview
de Jean Lemaître [à paraître dans Le
Monde Libertaire n°1834, décembre 2021]. Auteur
de La Commune des Lumières,
une utopie libertaire (Portugal, 1918) il vient de publier
Le vrai Christophe Colomb
(contre-enquête) aux éditions Jourdan. Jean
nous a autorisé à publier un texte qu'il a écrit
récemment sur la menace que fait toujours peser sur l’avenir
de la planète cet arsenal de mort détenu par de
nombreux États.
Avions
de guerre, armes de guerre nucléaire, ces graves menaces que
les grandes puissances cachent à Glasgow (Cop 26)...
Les
menaces de guerre nucléaire (une seule bombe atomique peut
pulvériser 20 fois la planète, pour l'éternité)
ne sont pas abordées par les grandes puissances au sommet de
Glasgow. Or les risques sur ce plan croissent d'année en
année. Exemple, rien qu'au Moyen et Proche orient, une
pétaudière, le danger est extrême ! Pour le
moment, Israël, L'Arabie Saoudite, l'Iran, la Jordanie, l’Égypte
accroissent à une vitesse v², dans un climat de tensions
toujours plus fortes entre pays rivaux, leurs capacités à
énergie nucléaire à des fins directement
militaires.... Une étincelle et boum !
Autres
menaces et dommages réels, qui passent sous les radars de
l'indignation : les exercices ou actions de guerre des avions
militaires, chasseurs, bombardiers...A cet égard, le site
Reporterre pointe les pollutions gigantesques de notre atmosphère
notamment engendrées par les avions militaires. Et ce site
d'épingler le fait que « le Département de
la Défense des États-Unis, avec ses avions militaires,
a émis en 2017 des émissions de CO2 supérieures
à celles d’un pays tel que la Suède (10 millions
d’habitants) ». Quant au secteur militaro-industriel
britannique, celui-ci, selon le même site, « émet
chaque année plus de gaz à effet de serre que soixante
pays individuels, comme l’Ouganda (45 millions d’habitants). »
Vraiment
inquiétant ce « black out » ! En
1983, quelque 300.000 manifestants, un record absolu de mobilisation
citoyenne, défilaient à Bruxelles contre le danger du
nucléaire militaire en Europe. Aujourd'hui, plus rien. Tabou.
Silence radio. Pas un mot. Le monde est muet à ce propos. Même
au sein des mouvements écologistes, ce sujet brûlant
semble avoir été glissé sous le tapis des
revendications !
Jean
Lemaître
« L'aliénation
se définit comme étant la perte de la liberté
naturelle à laquelle tout être humain peut prétendre.
Liberté de mouvement, de pensée, de décision et
d'exécution, dont la dépossession réduit celui
ou celle qui en est la victime au rang d'objet. C'est-à-dire
au rang d'un animal de labeur ou d'une bête d'agrément.
Mais ce jour-là a également commencé la lutte de
l'esclave - de l'aliéné - Pour reconquérir
sa liberté et ce second phénomène a pris le nom
de lutte de classes. »
Maurice
Fayolle, Réflexions sur
l'anarchisme, 1965
La
situation économique des masses laborieuses s'est vachement
détériorée avec les crises successives. La
généralisation du chômage covid a amputé
les salaires pour des millions de salarié.e.s. Sans oublier le
blocage des salaires pour 2021/2022.
Les
prix à la consommation flambent et tout particulièrement
ceux de l'énergie et nous ne sommes qu'aux portes de l'hiver !
La
gazette syndicale la Fédération Générale
du Travail de Belgique (FGTB) vient de balancer quelques chiffres
interpellants :
•
8,4% de prolétaires
bossant en Belgique ne peuvent plus aujourd'hui se permettre
d'allumer le chauffage
•
2.152.000 de personnes
risquent de tomber dans la pauvreté ou l'exclusion sociale
•
29% des familles
monoparentales avec enfants ne gagnent pas assez de flouze pour
couvrir tous les besoins de la smala
La
flambée des prix et la précarité croissante
reposent avec force la question du pouvoir « d'achat »,
des salaires et du partage des richesses, en partant des intérêts
des travailleuses et des travailleurs.
Car
comme le souligne le mensuel « La Forge »
d'octobre :
«
Qu'est-ce d'autre que le salaire dans la société
capitaliste si ce n'est ce qui permet le renouvellement de la force
de travail pour, jour après jour, perpétuer le
processus de travail et donc la possibilité d'acquérir
le nécessaire pour vivre et subvenir à ses besoins et
ceux de sa famille. »
Que
le Capital (avec le soutien de l'État) ait intérêt
à bloquer ou baisser les salaires pour se faire un maximum de
fric, ça paraît logique dans cette société
capitaliste.
Ce
qu'il y a d'intéressant, c'est qu'on a devant les mirettes les
contradictions entre les intérêts des prolos (la
majorité de la population) et cette dictature du profit. Ça
remet la question des salaires au centre des revendications et de la
contestation sociale. Un retour aux fondamentaux de la lutte des
classes.
Nous
espérons que l'accumulation des colères nous mettra
dans l'obligation de lutter. De défendre nos intérêt
contre ce système basé sur l'exploitation, la course au
pèse et la concurrence exacerbée. De mettre enfin en
pétard nos frangines et nos frangins !
Jennifer
Assoudé
Groupe
Ici & Maintenant (Belgique) de la Fédération
anarchiste
BlackRock, la multinationale
américaine spécialisée dans la spéculation
et la gestion d'actifs, régit désormais l’équivalent
du PIB (produit intérieur brut : valeur totale de la
production de richesse à l'intérieur d'un territoire)
additionné de la Grande-Bretagne, de la France et de
l’Allemagne. Un dérisoire magot de 8680 milliards de
dollars... ça jongle lourd ! Ce sont donc 1200 milliards
de plus pour la pandémique année 2020. Juste pour
situer l’truc : en 2019, le PIB de la Belgique était de
473,1 milliards d’euros... Et nous là-dedans ?
L’austérité, un futur AIP (accord
inter-professionnel) squelettique, des luttes bâillonnées
et confinées, l’exploitation accrue des salarié.e.s,
l’exacerbation de la concurrence, le renforcement de
l’autoritarisme du capital et de l’État, la
dégressivité du montant des allocations sociales,...
Avec
la formation du capital financier, la richesse sociale se concentre
de plus en plus entre les mains du petit groupe des monopolistes
ultra-puissants. L’oligarchie financière règne
sans partage sur l’économie des pays et se subordonne
l’État bourgeois et lui dicte sa loi. Tout est lié.
Et même si ça flanque la colique aux conformistes de
tout crin, on termine par ce petit brodage de E. Armand: « Être
anarchiste c’est nier l’autorité et rejeter son
corollaire économique : l’exploitation. Et cela dans
tous les domaines où s’exerce l’activité
humaine. L’anarchiste veut vivre sans dieux ni maîtres ;
sans patrons ni directeurs (...) »
Pas
mieux, compagnon !
Banlieue
rouge, Groupe Ici & Maintenant (Fédération
anarchiste)
Tu veux rire un peu ? Commençons avec du factuel, relevé
dans la presse qui donne des nouvelles du monde financier (Les Échos
– lesechos.fr) : « Alors que des pans entiers
de l'économie mondiale sont menacés par les
restrictions d'activité pour lutter contre la pandémie,
les milliardaires sont toujours plus nombreux et les montants si
élevés qu'ils deviennent difficiles à
appréhender. » En moyenne, les milliardaires ont vu
leur fortune bondir de 14 % cette année en Europe, de
25 % en Amérique du Nord et de près de 50 %
en Asie.
Année de
merde, 2020 ? On a vu les gogos se souhaiter la bonne année
en faisant le bras d’honneur à l’année
écoulée, et que 2021, ça sera mieux. En fait, ça
ne sera pas mieux, peut-être pas pire, parce que rien ne
change, en fait, si on considère l’histoire récente.
Y a des industriels qui sont sortis richissimes de la seconde guerre
mondiale, même en étant dans le camp des vaincus. Quand
y a du mou dans la société, y a toujours des petits
malins qui tirent les marrons du feu et qui en profitent. Et tu sais
quoi, le truc marrant ? T’en fais pas partie ! Alors
oui, ça fait un brin tartir de voir que des grosses fortunes
gonflent encore un peu plus quand toi, eh bien toi, déjà
avant tu galérais, mais ça va pas s’arranger. Ton
patrimoine est pas composé d’actifs cotés,
suppose un peu. Les Bourses mondiales sont euphoriques, mais les
centres culturels demeurent fermés, les théâtres,
les cafés, les restos. Cherche un peu l’erreur. Et toi,
tu bosses. Ou tu pointes.
Nous on sait que
t’as un peu de mal pour payer ton loyer, que t’as envie
de chialer lorsque tu reçois l’invitation à payer
l’assurance de ta bagnole. Que tu galères pour trouver
un taf décent. Ou que t’as l’impression de te
faire bolosser dès que tu découvres le montant de ta
facture de gaz-élec... Et pourtant, pour la première
fois dans l'histoire du monde, cinq personnes possèdent des
fortunes personnelles d'au moins 100 milliards de dollars !
Rien ne change, on a
dit. Les riches deviennent plus riches. La nouveauté, c’est
qu’ils deviennent tellement riches qu’ils finissent
eux-mêmes par trouver cela étrange (sur Twitter,
l'entrepreneur Elon Musk a réagi à l'annonce de la
nouvelle qu’il était l’homme le plus riche du
monde par un commentaire laconique : « Tellement
étrange »). Étrange,
oui, que ça se passe, que ça se produise, quand toi et
d’autres avez du mal avec les fins de mois et qu’on vous
dit : « Vous z’avez qu’à... »
On
n’a qu’à, oui… Et on va
y penser
sérieusement.
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